Résumé :
- Gabriel Attal propose un budget 2025 identique à celui de 2024
- Le montant total des crédits s’élève à 492 milliards d’euros
- Cette décision intervient dans un contexte politique incertain
- La France fait face à des pressions européennes sur son déficit public
- Le prochain gouvernement devra finaliser rapidement ce budget
- Les marchés financiers s’inquiètent de la situation budgétaire française
Hier, Gabriel Attal, Premier ministre démissionnaire, a lancé un pavé dans la mare des finances publiques françaises. En transmettant aux ministères les « lettres plafonds » du projet de budget 2025, il a choisi de reconduire à l’identique les crédits de 2024. Une décision qui, sous couvert de pragmatisme, soulève de nombreuses questions et inquiétudes.
Cette initiative, présentée comme une volonté d’assurer la continuité de l’État et d’éviter un « mur budgétaire », intervient dans un contexte politique particulièrement instable. Alors que le gouvernement est démissionnaire depuis le 16 juillet, et que le prochain exécutif n’est pas encore formé, cette proposition budgétaire pourrait bien être une bombe à retardement pour les finances publiques françaises.
Un budget 2025 calqué sur 2024 : continuité ou immobilisme ?
Le projet de budget 2025 présenté par Gabriel Attal s’élève à 492 milliards d’euros, soit un montant identique à celui de 2024. Cette reconduction à l’euro près pourrait sembler, à première vue, une approche prudente dans un contexte d’incertitude politique. Cependant, elle masque une réalité plus complexe.
En effet, cette stabilité apparente cache en réalité une économie réelle d’environ 10 milliards d’euros. Comment ? Tout simplement parce que ce budget ne prend pas en compte l’inflation, estimée à 2% pour l’année à venir. En d’autres termes, à périmètre constant, les ministères devront faire plus avec moins.
La proposition d’Attal n’a pas fait l’unanimité au sein même du gouvernement sortant. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, avait initialement plaidé pour des coupes plus drastiques, proposant un budget réduit à 487 milliards d’euros. Cette différence de 5 milliards illustre les tensions qui existent autour de la question budgétaire, même au sein de l’exécutif.
Le désaccord entre Attal et Le Maire soulève une question fondamentale : faut-il privilégier la stabilité budgétaire ou accélérer la réduction des dépenses publiques ? Ce débat, loin d’être clos, sera sans doute au cœur des discussions lors de la finalisation du budget par le prochain gouvernement.
Objectif 3% : le parcours du combattant budgétaire de la France
La proposition budgétaire d’Attal s’inscrit dans un contexte plus large : celui des engagements de la France vis-à-vis de l’Union européenne. L’objectif affiché est de ramener le déficit public à 3% du PIB d’ici 2027, conformément aux règles du Pacte de stabilité et de croissance européen.
Cependant, la situation actuelle est préoccupante. En 2023, le déficit a atteint 5,5% du PIB, tandis que la dette publique avoisine les 111% du PIB. Ces chiffres placent la France dans une position délicate vis-à-vis de ses partenaires européens et soulèvent des doutes quant à sa capacité à respecter ses engagements.
Face à cette situation, l’Union européenne n’est pas restée inactive. Le 26 juillet 2024, Bruxelles a formellement lancé une procédure pour déficit excessif à l’encontre de la France, ainsi que de plusieurs autres États membres.
Cette procédure n’est pas anodine. Elle place la France sous surveillance renforcée et l’oblige à présenter un plan de redressement crédible. En l’absence d’efforts suffisants, le pays s’expose à des sanctions financières qui pourraient atteindre 2,5 milliards d’euros. Une perspective qui ajoute une pression supplémentaire sur les épaules du prochain gouvernement.
Face à cette menace, la France se trouve dans l’obligation de présenter un plan de redressement d’ici septembre. Ce plan devra démontrer la capacité du pays à réduire significativement son déficit dans les années à venir.
Les lettres plafonds qui fixent le budget de chaque ministère pour 2025 seront envoyées mardi soirhttps://t.co/Wc7ZQh3rBi
— franceinfo (@franceinfo) August 20, 2024
La proposition budgétaire d’Attal, qui ne prévoit pas de réductions drastiques des dépenses, pourrait compliquer l’élaboration de ce plan. Le prochain gouvernement devra donc probablement revoir en profondeur le projet de budget 2025 pour le rendre compatible avec les exigences européennes.
Les enjeux économiques et financiers pour la France
La situation budgétaire incertaine de la France n’est pas sans conséquences sur les marchés financiers. Comme le souligne Gilles Moëc, chef économiste chez Axa, « Tout le monde scrute l’état des finances publiques françaises ». Cette attention accrue pourrait avoir des répercussions sur le coût de financement de la dette française.
Jusqu’à présent, les investisseurs ont réagi de manière relativement favorable aux émissions d’emprunts d’État français. Cependant, l’instabilité politique actuelle et les incertitudes budgétaires pourraient changer la donne. Une augmentation du coût de financement de la dette aurait des conséquences importantes sur les marges de manœuvre budgétaires du pays.
Le contexte économique global n’arrange pas la situation de la France. Les prévisions pour 2024 sont peu encourageantes, avec une croissance du PIB attendue à seulement 0,9% pour la zone euro. Cette faible croissance complique encore davantage l’équation budgétaire française.
En France, la reprise économique reste fragile. Elle est marquée par une faible demande intérieure et une légère hausse du chômage. Ces facteurs pourraient peser sur les recettes fiscales, rendant d’autant plus difficile l’atteinte des objectifs de réduction du déficit.
Le prochain gouvernement français héritera donc d’une situation particulièrement complexe. Il devra concilier plusieurs impératifs :
- Finaliser rapidement le budget 2025, en partant de la base proposée par Attal
- Élaborer un plan de redressement crédible pour satisfaire aux exigences européennes
- Trouver des marges de manœuvre pour stimuler une croissance économique atone
- Tout cela, dans un contexte politique potentiellement instable, avec un Parlement divisé
La tâche s’annonce titanesque et les choix qui seront faits auront des répercussions importantes sur l’économie française pour les années à venir.