Résumé :
- Une fraude massive évaluée à 21,4 milliards d’euros vient d’être découverte sur le marché immobilier français
- Près d’un logement sur cinq classé F obtient artificiellement la note E
- Plus d’un million de propriétés sont concernées par ces pratiques frauduleuses
- Des solutions innovantes émergent pour mettre fin à ce système
Le diagnostic de performance énergétique (DPE) est devenu en quelques années un document incontournable du marché immobilier français. Censé garantir la transparence sur la qualité énergétique des logements, ce précieux sésame s’est progressivement transformé en un véritable outil de valorisation – ou de dévalorisation – des biens immobiliers. Mais une étude minutieuse menée par la start-up KRNO vient de mettre en lumière un système de fraude d’une ampleur insoupçonnée.
En effet, après avoir analysé plus de 8 millions de diagnostics issus de la base ADEME, l’entreprise a mis au jour des anomalies statistiques troublantes qui révèlent une pratique bien plus répandue qu’on ne l’imaginait : les « DPE de complaisance ».
L’ampleur insoupçonnée de la fraude
Les chiffres mis en avant par l’étude donnent le vertige. Près de 19% des logements qui devraient être classés F obtiennent mystérieusement la note E. Ce pourcentage ne doit rien au hasard : il correspond très exactement au seuil permettant d’échapper à la classification redoutée de « passoire thermique ». De même, 6% des biens qui devraient porter la lettre G se retrouvent classés F, tandis qu’une proportion identique de logements E se voit attribuer la note D.
En termes financiers, l’impact est considérable. Avec un prix moyen des biens immobiliers estimé à 250 000 euros en France, et des écarts de valorisation pouvant atteindre 10% entre deux lettres, le préjudice total est estimé à 21,4 milliards d’euros. Une somme qui donne la mesure de l’enjeu économique derrière ces pratiques.
Les dessous du système
Comment expliquer un tel phénomène ? L’étude de KRNO met en lumière plusieurs failles systémiques. Contrairement au métrage Carrez, qui impose une marge d’erreur maximale de 5%, le DPE ne prévoit aucune limite de ce type. Plus problématique encore, les diagnostiqueurs peuvent connaître le résultat de leur évaluation avant son enregistrement officiel, ouvrant la porte à d’éventuels ajustements.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que la pression sur les diagnostiqueurs est forte. Entre des propriétaires anxieux de voir leur bien dévalué et un marché immobilier de plus en plus sensible à la performance énergétique, ces professionnels se retrouvent souvent dans une position délicate.
Les solutions pour l’avenir
Face à ce constat, KRNO propose plusieurs pistes d’amélioration concrètes. La première consisterait à imposer la transmission et l’enregistrement des données brutes sur la base ADEME avant toute communication du résultat final. Cette mesure simple permettrait de tracer facilement d’éventuelles modifications ultérieures.
Une autre proposition serait la mise en place d’un système de contre-expertise, permettant aux acheteurs de vérifier la validité du diagnostic initial. À plus long terme, l’instauration d’un contrôle régulier, sur le modèle du contrôle technique automobile, pourrait garantir un suivi plus précis de la performance énergétique des logements.
Ces solutions, bien que plus coûteuses que le système actuel, apparaissent comme un investissement nécessaire pour restaurer la confiance dans un marché immobilier de plus en plus dépendant de ces diagnostics énergétiques.