Résumé :
- Le gouvernement canadien a gelé 43 millions de dollars d’aides destinées à Tesla après que l’entreprise a déposé 8 669 demandes de subvention en seulement trois jours.
- Cette manœuvre a épuisé l’enveloppe budgétaire du programme fédéral iZEV, qui offrait 5 000 dollars canadiens par véhicule électrique acheté.
- La ministre des Transports Chrystia Freeland a déclaré qu’aucun paiement ne sera effectué tant que la validité des demandes ne sera pas confirmée.
- Le gouvernement canadien a également décidé d’exclure Tesla des futurs programmes d’aides tant que les tarifs douaniers américains sur les produits canadiens seront maintenus.
- Plusieurs provinces canadiennes (Colombie-Britannique, Nouvelle-Écosse, Manitoba, Île-du-Prince-Édouard) ont également banni Tesla de leurs programmes de subventions.
C’est l’histoire d’un coup de poker qui tourne mal. Début 2025, Tesla flaire une opportunité : le programme canadien d’aides à l’achat de véhicules électriques, baptisé iZEV, arrive bientôt à épuisement. Le gouvernement prévient les constructeurs que l’enveloppe de subventions ne tiendra pas jusqu’à la fin mars comme prévu initialement. Ce qui se passe ensuite défie l’entendement.
Un week-end, 8 600 voitures et 43 millions de dollars
En l’espace de 72 heures seulement, entre le 10 et le 12 janvier 2025, Tesla dépose une avalanche de demandes de subventions totalisant 43,2 millions de dollars canadiens. Cela représente le traitement de 8 669 dossiers d’achat de véhicules, chacun éligible à une prime de 5 000 dollars canadiens (environ 3 200 euros).
Cette opération éclair a littéralement asséché les caisses du programme fédéral. Une véritable razzia qui a laissé tous les autres constructeurs sur le carreau avec plus de 10 millions de dollars de remboursements promis mais désormais sans financement.
Le problème ? Il paraît statistiquement impossible que Tesla ait réellement vendu autant de voitures en un week-end dans ses quatre concessions canadiennes. Cela représenterait une voiture vendue toutes les deux minutes par showroom, jour et nuit pendant trois jours !
« Qu’est-ce que Tesla savait ? Quand l’ont-ils su ? Et comment ont-ils pu agir d’une manière aussi inhabituelle en un seul week-end ? »
Huw Williams de l’Association des concessionnaires d’automobiles du Canada.
Le Canada sort les crocs
Face à ce qui ressemble à une tentative de détournement des fonds publics, la réaction ne s’est pas fait attendre. Chrystia Freeland, la ministre canadienne des Transports, a pris une décision radicale le 25 mars : bloquer tous les paiements destinés à Tesla.
« Aucun paiement ne sera effectué tant que nous n’aurons pas la certitude que ces demandes sont valables »
Chrystia Freeland au Toronto Star.
Et ce n’est pas tout. La ministre a également demandé à son ministère de modifier les critères d’éligibilité des futurs programmes d’aides pour s’assurer que les véhicules Tesla en soient exclus. Une décision particulièrement sévère qu’elle justifie par le contexte des tensions commerciales avec les États-Unis :
« Les véhicules Tesla ne seront pas admissibles aux programmes d’incitation tant que les tarifs américains illégaux seront imposés au Canada ».
Ce coup de force diplomatique et économique s’inscrit dans un climat particulier, alors que l’administration Trump, proche d’Elon Musk, s’apprête à imposer 25 % de droits de douane sur les voitures importées aux États-Unis dès le 1er avril 2025.
L’effet domino anti-Tesla
La décision fédérale a déclenché une vague de mesures similaires à travers le pays. La Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse, le Manitoba et l’Île-du-Prince-Édouard ont tous exclu Tesla de leurs programmes provinciaux de subventions aux véhicules électriques.
Les victimes collatérales de cette affaire sont nombreuses. Plusieurs concessionnaires d’autres marques se retrouvent avoir avancé des sommes allant jusqu’à 100 000 dollars en anticipant la réception des aides gouvernementales. Des sommes qu’ils ne pourront pas récupérer à cause du coup de force de Tesla.
Ce n’est pas la première fois que le constructeur américain joue avec les frontières des aides publiques. Aux États-Unis comme en Europe, Tesla a déjà été pointé du doigt pour ses stratégies agressives d’optimisation des subventions. Mais cette fois, la marque semble avoir franchi une ligne rouge.
Musk a peut-être voulu jouer au plus malin avec le Canada, mais son coup de poker pourrait lui coûter non seulement les 43 millions qu’il pensait récupérer, mais aussi l’accès à tout futur programme d’aides dans le pays. Une leçon que Tesla n’est pas près d’oublier.