Résumé :
- Sarah Wynn-Williams, ancienne directrice des politiques globales de Meta pour la Chine, affirme que l’entreprise était prête à mettre en place un système de censure drastique pour accéder au marché chinois.
- Selon la plainte, Meta aurait développé en 2015 un système de censure spécifique et proposé d’installer un « rédacteur en chef » pouvant supprimer du contenu et fermer la plateforme lors de troubles sociaux.
- Zuckerberg aurait été disposé à sévir contre un dissident chinois vivant aux États-Unis pour s’attirer les faveurs du régime chinois.
- Ces révélations contrastent avec la position actuelle de Meta, qui critique publiquement la Chine et affirme soutenir les valeurs américaines en matière d’IA.
- Meta réfute ces accusations, affirmant qu’elles proviennent d’une « employée licenciée il y a huit ans pour mauvaises performances » et que l’entreprise a abandonné ces projets.
Des concessions alarmantes pour séduire Pékin
L’ambition de Meta d’entrer sur le marché chinois n’est pas nouvelle, mais l’ampleur des compromis que la société était prête à faire est stupéfiante. Selon le document de 78 pages examiné par le Washington Post, Meta aurait développé dès 2015 un système de censure spécifique pour la Chine.
Plus troublant encore, l’entreprise aurait proposé d’installer un « rédacteur en chef » doté de pouvoirs considérables – notamment celui de décider quel contenu supprimer et même de fermer complètement la plateforme en période de troubles sociaux. Une concession qui aurait placé les utilisateurs chinois sous la surveillance directe du régime.
« Pendant de nombreuses années, Meta a travaillé main dans la main avec le Parti communiste chinois, les informant des derniers développements technologiques tout en mentant à ce sujet », affirme Wynn-Williams. « Les gens méritent de connaître la vérité. »
Zuckerberg prêt à sacrifier des dissidents pour plaire à Pékin
Les accusations ne s’arrêtent pas là. Selon la lanceuse d’alerte, Zuckerberg aurait été disposé à sévir contre un dissident chinois de haut profil vivant aux États-Unis, cédant ainsi aux pressions d’un officiel chinois de haut rang pour s’attirer les faveurs du régime. Une manœuvre qui contraste fortement avec l’image publique de défenseur des libertés numériques que le PDG tente de projeter aujourd’hui.
Meta aurait également accepté de stocker localement les données des utilisateurs, les rendant ainsi facilement accessibles aux autorités chinoises. Une pratique qui aurait exposé les utilisateurs chinois à des risques considérables dans un pays connu pour son régime de surveillance sophistiqué.
Un revirement stratégique face aux tensions sino-américaines
Ironie du sort, ces révélations surviennent à un moment où Zuckerberg multiplie les critiques envers la Chine. En 2019, il mettait déjà en garde contre l’exportation du modèle internet chinois vers d’autres pays. Plus récemment, Joe Kaplan, responsable des affaires mondiales de Meta, affirmait que l’entreprise travaillerait avec l’administration américaine pour « maintenir les États-Unis à la pointe de l’IA et s’assurer que les normes mondiales en matière d’IA soient basées sur nos valeurs partagées, pas celles de la Chine. »
Ce changement de discours s’inscrit dans un contexte de tensions technologiques croissantes entre la Chine et les États-Unis. Meta aurait même financé American Edge, une organisation à but non lucratif menant des campagnes critiques contre la Chine et TikTok, propriété du chinois ByteDance.
Meta conteste les accusations
Sans surprise, Meta réfute catégoriquement ces allégations. « Tout cela est poussé par une employée licenciée il y a huit ans pour mauvaises performances », a déclaré un porte-parole de l’entreprise. « Nous n’exploitons pas nos services en Chine aujourd’hui. Ce n’est pas un secret que nous avons été intéressés à le faire dans le cadre de l’effort de Facebook pour connecter le monde. »
Le porte-parole a ajouté que l’entreprise avait « finalement choisi de ne pas donner suite aux idées explorées », une décision qu’aurait annoncée Mark Zuckerberg en 2019.
Un rapprochement avec Trump qui soulève des questions
Ces révélations surviennent dans un contexte particulier pour Meta. En janvier dernier, l’entreprise a accepté de verser 25 millions de dollars à Donald Trump pour régler un litige concernant sa suspension de Facebook et Instagram après l’insurrection du Capitole.
Depuis le début de l’année, Meta aurait modifié ses produits et politiques en accord avec la position politique de Trump, suscitant l’inquiétude des annonceurs quant à l’évolution de la modération de contenu sur ses plateformes.
Le mois dernier, Zuckerberg s’est rendu à la Maison Blanche pour discuter de la façon dont Meta pourrait soutenir et promouvoir le leadership technologique américain à l’étranger, renforçant ainsi ses liens avec l’administration Trump.

Un éclairage sur les pratiques des géants technologiques
Cette affaire met en lumière les compromis éthiques que les géants de la tech sont prêts à faire pour accéder à de nouveaux marchés lucratifs. Elle soulève également des questions cruciales sur la protection de la liberté d’expression, la gestion des données personnelles et l’influence des régimes autoritaires sur nos plateformes numériques.
Alors que l’administration Trump intensifie sa rivalité technologique avec la Chine, ce scandale pourrait bien alimenter les débats sur la régulation des grandes entreprises technologiques et leur rôle dans la défense des valeurs démocratiques à l’échelle mondiale.
L’histoire de Meta en Chine nous rappelle que derrière les discours sur la connexion du monde et le progrès technologique se cachent parfois des compromis troublants que les utilisateurs ignorent. Des compromis qui, révélés au grand jour, pourraient bien entacher durablement la réputation de l’entreprise de Mark Zuckerberg.