Résumé :
- Intel vend 51% de sa filiale Altera à Silver Lake pour 4,46 milliards de dollars, valorisant l’entreprise à 8,75 milliards (contre 17 milliards lors de son acquisition en 2015)
- Cette vente est la première grande décision du nouveau PDG Lip-Bu Tan pour redresser Intel, qui conservera 49% d’Altera
- Raghib Hussain (ex-Marvell) remplacera Sandra Rivera comme PDG d’Altera à partir du 5 mai 2025
- En 2024, Altera a généré seulement 3% du chiffre d’affaires d’Intel avec 1,54 milliard de dollars et une perte opérationnelle de 615 millions
- Cette restructuration pourrait se poursuivre avec d’autres cessions d’actifs « non essentiels » comme Mobileye Global
Une dévaluation qui pose question
Impossible de ne pas remarquer l’écart de valorisation. Acquise en 2015 pour près de 17 milliards de dollars, Altera est aujourd’hui cédée pour moitié moins. Une pilule amère mais nécessaire selon la direction d’Intel, qui y voit un moyen de renforcer son bilan et de renflouer ses caisses mises à mal par les ambitieuses – et coûteuses – initiatives de l’ancien PDG.
« L’annonce d’aujourd’hui reflète notre engagement à mieux cibler notre action, à réduire notre structure de dépenses et à renforcer notre bilan », a déclaré Lip-Bu Tan dans le communiqué officiel.
Cette vente semble avoir rassuré Wall Street : l’action Intel grimpait de 2,8% après l’annonce, signe que les marchés approuvent cette stratégie de recentrage sur le cœur de métier.
Un nouveau départ pour Altera
La transaction propulse Altera au rang de « plus grande entreprise indépendante de solutions semi-conductrices FPGA », selon les termes de l’accord. Ces puces programmables, qui peuvent être reconfigurées après fabrication, sont utilisées dans une multitude de secteurs allant des télécommunications à l’aérospatiale en passant par l’intelligence artificielle.
Pour piloter cette nouvelle ère, un changement à la tête d’Altera est également annoncé : Raghib Hussain, ancien dirigeant du fabricant de puces d’IA personnalisées Marvell, succédera à Sandra Rivera à partir du 5 mai 2025.
« Je suis enthousiaste à l’idée de diriger Altera dans ce nouveau chapitre. Cette étape avec Silver Lake renforce le parcours d’Altera pour devenir le premier fournisseur mondial de solutions FPGA, » a déclaré Hussain.
Une stratégie plus large de restructuration
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2024, Altera a généré un chiffre d’affaires de 1,54 milliard de dollars, représentant à peine 3% des revenus totaux d’Intel, pour une perte opérationnelle de 615 millions de dollars. La filiale n’a jamais réellement trouvé sa place dans l’écosystème Intel.
L’un des problèmes majeurs ? La transition de la fabrication des puces d’Altera du taïwanais TSMC vers les usines d’Intel s’est avérée plus complexe que prévu, permettant à Xilinx, son principal concurrent (désormais propriété d’AMD), de gagner des parts de marché.
« La cession d’Altera intervient dans un cycle baissier du marché et au plus bas des performances commerciales d’Altera. Ce n’est pas le meilleur moment pour vendre la participation d’Altera », a nuancé Hendi Susanto, gestionnaire de portefeuille chez Gabelli Funds, qui détient des actions Intel. « Néanmoins, certains investisseurs pourraient voir la transaction d’un œil plus positif, en ce sens qu’elle permettrait à Intel de se concentrer davantage sur ses activités principales. »
Et ce n’est probablement que le début…
Cette cession pourrait n’être que la première d’une série. Selon Bob O’Donnell, analyste en chef chez Technalysis Research, Intel devrait continuer à se séparer d’actifs non stratégiques dans les mois à venir.
Les regards se tournent notamment vers Mobileye Global, la société spécialisée dans les technologies de conduite autonome, dans laquelle Intel détient une participation majoritaire. David Zinsner, directeur financier d’Intel, avait d’ailleurs laissé entendre en décembre que l’entreprise pourrait « utiliser les liquidités » provenant d’une éventuelle vente partielle de ses parts.
La transaction concernant Altera devrait être finalisée au second semestre 2025, après validation par les autorités de régulation. Intel conservera tout de même 49% de l’entreprise, ce qui lui permettra de bénéficier d’éventuels succès futurs tout en se recentrant sur son cœur de métier.
Face à la domination croissante de Nvidia dans l’intelligence artificielle et aux avancées d’AMD sur son terrain traditionnel des processeurs, Intel semble enfin prendre les mesures drastiques nécessaires à son renouveau. Reste à voir si cette stratégie de recentrage suffira à relancer le géant déchu des semi-conducteurs.