Résumé :
- Laurence Tubiana est pressentie pour devenir Premier ministre
- Son parcours va de l’extrême gauche à la diplomatie climatique internationale
- Elle est à l’origine de l’Accord de Paris sur le climat
- Sa candidature divise profondément la gauche française
- Ses liens avec les élites économiques suscitent la controverse
À 73 ans, Laurence Tubiana pourrait devenir la première femme à diriger le gouvernement français. Née en Algérie française et arrivée en métropole à l’âge de 11 ans, cette brillante économiste a gravi tous les échelons du pouvoir, des bancs de Sciences Po aux plus hautes sphères de la diplomatie internationale. Mais c’est son nom, proposé par les écologistes, le Parti socialiste et le Parti communiste pour diriger un potentiel gouvernement de gauche, qui fait aujourd’hui l’objet de toutes les attentions.
Son parcours, aussi riche que controversé, illustre les mutations profondes de la gauche française ces dernières décennies. De militante révolutionnaire à experte mondialement reconnue en développement durable, Laurence Tubiana incarne les espoirs mais aussi les contradictions d’une transition écologique qui cherche encore sa voie politique.
Des origines militantes à l’expertise en développement durable
Le parcours politique de Laurence Tubiana débute dans les années 1980, au sein de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR). Cette formation d’extrême gauche, qui deviendra plus tard le Nouveau Parti anticapitaliste, forge ses premières convictions politiques. Cependant, Tubiana ne tarde pas à prendre ses distances avec le militantisme radical pour s’orienter vers l’action concrète.
En 1980, elle fonde l’ONG Solagral, dédiée au développement de l’agriculture dans les pays du Sud. Cette expérience marque un tournant dans sa carrière, la dirigeant vers les questions de développement durable et de relations internationales. Parallèlement, elle poursuit une carrière académique brillante, obtenant un doctorat en sciences économiques et devenant professeure à Sciences Po Paris.
Ce glissement progressif du militantisme vers l’expertise s’accélère lorsqu’elle devient, en 1997, conseillère sur le développement durable auprès du Premier ministre Lionel Jospin. Cette première expérience au cœur du pouvoir marque le début d’une ascension fulgurante dans les sphères de la diplomatie environnementale.
L’ascension d’une éco-diplomate influente
C’est véritablement en 2015 que Laurence Tubiana accède à une reconnaissance internationale. Nommée ambassadrice chargée des négociations sur le changement climatique, elle joue un rôle crucial dans la préparation et le succès de la COP21 à Paris. Son habileté diplomatique et sa maîtrise des enjeux climatiques lui valent le surnom d' »architecte de l’Accord de Paris« , un traité historique signé par 195 pays.
Ce succès diplomatique propulse Tubiana au premier plan de la scène internationale. En 2016, elle est nommée « championne » pour le climat par Laurent Fabius, alors ministre des Affaires étrangères. Cette consécration se traduit par de nouvelles responsabilités : depuis 2017, elle dirige la Fondation européenne pour le climat, une organisation influente dans la définition des politiques environnementales européennes.
Controverses et critiques : une orientation politique ambiguë ?
Malgré ces accomplissements, l’orientation politique de Laurence Tubiana suscite des interrogations croissantes. Sa proximité avec les élites économiques mondiales, notamment sa participation au Forum de Davos, fait grincer des dents à gauche. Ses liens avec le fonds d’investissement BlackRock, qu’elle aurait qualifié de « fondation philanthropique », alimentent les soupçons d’une dérive vers un « capitalisme vert » peu compatible avec ses engagements initiaux.

Ces critiques s’intensifient lorsqu’elle est aperçue arborant le pin’s « Global Goals » de Bill Gates, symbole pour certains d’une approche trop libérale des enjeux environnementaux. Ses détracteurs l’accusent d’être devenue le « cheval de Troie des grandes fortunes » dans l’écosystème européen, utilisant son influence pour orienter les politiques publiques dans un sens favorable aux intérêts des multinationales.
La candidature au poste de Premier ministre : révélatrice des tensions à gauche
Si c'est ce profil que travaillent nos partenaires, je tombe de ma chaise.
— La France insoumise 🔴 #NouveauFrontPopulaire (@FranceInsoumise) July 16, 2024
On nous propose une personne qui a signé une tribune il y a quatre jours appelant à une coalition avec les macronistes.@mbompard coordinateur de la France insoumise sur France 2. pic.twitter.com/ImSYtJm26I
La proposition de Laurence Tubiana comme potentielle Première ministre d’un gouvernement de gauche cristallise ces tensions. Si les écologistes, le Parti socialiste et le Parti communiste voient en elle une figure capable de porter une politique ambitieuse de transition écologique, La France Insoumise exprime de fortes réserves.
Les Insoumis critiquent notamment sa signature récente d‘une tribune appelant à une coalition avec les macronistes, y voyant la preuve d’un positionnement centriste incompatible avec un véritable programme de gauche. Le député LFI Paul Vannier va jusqu’à qualifier sa potentielle nomination de « trahison de l’engagement pris devant des millions d’électeurs« .