Résumé :
- Une vidéo virale diffuse une fausse information affirmant que les virements bancaires supérieurs à 800 euros seront automatiquement bloqués pendant 24 heures à partir d’octobre 2025, soi-disant pour vérification par les banques et l’administration fiscale
- Les autorités démentent catégoriquement : le ministère de l’Économie qualifie cette information de « fake news » et la Fédération bancaire française confirme qu’aucun blocage automatique n’est prévu
- Un nouveau système de sécurité européen sera effectivement déployé le 9 octobre 2025, mais il s’agit d’une vérification instantanée de la concordance entre le nom du bénéficiaire et le numéro IBAN, sans aucun délai d’attente
- Le dispositif « Verification of Payee » (VoP) vise à protéger les consommateurs contre les fraudes et les erreurs de virement, sans impliquer l’administration fiscale ni créer de surveillance des transactions
- Cette désinformation illustre comment les fake news financières exploitent les craintes liées à la surveillance et aux libertés individuelles pour générer de l’engagement sur les réseaux sociaux
Une fake news qui enflamme les réseaux sociaux
Depuis fin mai 2025, une vidéo du compte TikTok « actu.france25 » accumule les partages et les commentaires indignés. Son message choc : à partir du 16 octobre 2025, impossible d’envoyer plus de 800 euros à un proche sans voir son virement bloqué pendant une journée entière. La raison invoquée ? Un prétendu système de contrôle mis en place conjointement par les banques et l’administration fiscale pour traquer les transferts non déclarés.
L’effet est immédiat. Plus de 12 000 utilisateurs relaient l’information, tandis que les commentaires s’enflamment. « Nous n’avons plus de libertés dans ce pays », s’insurge un internaute. D’autres dénoncent une mesure « digne d’une dictature ». La vidéo, qui mélange habilement vraies actualités et désinformation, joue sur les peurs liées à la surveillance financière pour maximiser son impact viral.
Bercy et les banques sortent du silence
Face à cette déferlante, les autorités réagissent sans ambiguïté. Le ministère de l’Économie qualifie directement la vidéo de « fake news », affirmant ne disposer d' »aucun élément sur de pareilles allégations ». La Fédération bancaire française, qui représente l’ensemble des établissements bancaires du pays, confirme catégoriquement qu’il « n’est pas prévu de bloquer automatiquement les virements de plus de 800 euros ».
Les professionnels du secteur pointent du doigt une manipulation grossière de l’information. Cette intox aurait été construite « à partir d’une information vaguement en lien avec le sujet », transformant une mesure de sécurité européenne en dispositif de surveillance généralisée.
La vérité derrière le changement réglementaire
Si aucun blocage de 24 heures n’est prévu, un changement interviendra bien le 9 octobre 2025. Mais loin d’être une mesure liberticide, il s’agit d’une avancée majeure pour la sécurité des consommateurs, imposée par un règlement européen adopté en mars 2024.
Les banques devront proposer un système de vérification instantanée baptisé « Verification of Payee » (VoP). Son principe est simple : avant d’effectuer un virement, vous serez informé si le nom que vous avez saisi correspond bien au titulaire du compte destinataire. Une alerte préventive qui pourrait éviter bien des arnaques et des erreurs coûteuses.
Cette vérification sera immédiate – aucune suspension de 24 heures, et concernera tous les virements, sans montant minimum. Vous recevrez l’une des quatre réponses possibles : correspondance parfaite, absence de correspondance, correspondance proche, ou vérification impossible. Libre à vous ensuite de valider ou d’annuler le transfert.
Un dispositif qui renforce votre protection
Contrairement aux fantasmes véhiculés sur les réseaux sociaux, ce système n’a rien à voir avec une surveillance fiscale. L’administration fiscale n’est pas impliquée dans le processus, et les banques ne communiqueront aucune information personnelle. Pour des raisons de protection des données, vous ne connaîtrez pas le nom exact du titulaire du compte, seulement le niveau de correspondance avec les informations saisies.
L’objectif affiché par les autorités européennes est clair : éviter que des millions d’euros ne disparaissent chaque année dans des virements frauduleux ou erronés. Dans un contexte où les arnaques bancaires se multiplient, ce garde-fou supplémentaire arrive comme une protection bienvenue pour les consommateurs.
Comment fonctionne concrètement ce nouveau système
Le dispositif VoP, développé conjointement par les banques centrales portugaise et lettone, permettra une communication instantanée entre établissements bancaires. Lorsque vous initierez un virement, votre banque interrogera automatiquement celle du destinataire pour vérifier la concordance des informations. La réponse sera immédiate, sans aucun délai d’attente.
Plusieurs grandes banques françaises, dont la Société Générale et le Crédit Agricole, ont déjà commencé à communiquer sur ce nouveau service. Le Conseil européen des paiements a lancé fin mars 2025 sa procédure de qualification pour garantir un déploiement harmonisé dans toute la zone euro.
Cette évolution s’inscrit dans un mouvement plus large de généralisation des virements instantanés en Europe. Depuis janvier 2025, toutes les banques de la zone euro doivent permettre la réception de virements instantanés, une première étape vers une modernisation complète des systèmes de paiement européens.
Un terreau fertile pour les fausses informations
Cette nouvelle intox illustre parfaitement comment la désinformation financière prospère sur les réseaux sociaux. En mélangeant des éléments de vérité, l’existence d’une nouvelle réglementation européenne, avec des affirmations anxiogènes totalement inventées, les créateurs de ces contenus exploitent les inquiétudes légitimes des citoyens face aux questions de surveillance et de liberté financière.
Le phénomène n’est pas nouveau. Les équipes de vérification de l’AFP ont déjà débunké plusieurs fake news similaires, comme celle prétendant qu’une nouvelle loi exigerait la déclaration aux impôts de tout achat supérieur à 1 000 euros à partir de 2026. Ces fausses informations, qui se propagent à une vitesse fulgurante, nécessitent une vigilance constante et des démentis rapides des autorités concernées.
Face à ces manipulations, un seul réflexe : vérifier systématiquement les informations auprès de sources officielles avant de les partager. Car derrière ces vidéos alarmistes se cachent souvent des comptes douteux qui surfent sur la peur pour générer de l’engagement, au détriment de la vérité et de la sérénité des citoyens.
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