Résumé :
- Donald Trump qualifie publiquement Jerome Powell, le président de la Fed, d’« immense loser » sur son réseau Truth Social.
- Le président américain menace explicitement de limoger Powell, ce qui remettrait en cause l’indépendance de la Fed.
- Ces tensions provoquent un effondrement du dollar qui perd plus de 1% face au yen et à l’euro.
- Wall Street s’effondre avec des baisses allant jusqu’à 2,57% pour le Nasdaq et 2,08% pour le S&P 500.
- Les experts financiers avertissent que cette instabilité représente un danger majeur pour l’économie mondiale.
Les relations entre Donald Trump et Jerome Powell viennent d’atteindre un nouveau point de rupture. Le 47e président des États-Unis a lancé une attaque frontale contre le président de la Réserve fédérale américaine sur son réseau social Truth Social, le qualifiant d’« immense loser » et de « Monsieur le retardataire ». Cette nouvelle escalade verbale s’accompagne de menaces de renvois massifs qui font trembler les marchés financiers du monde entier.
Cette montée des tensions a provoqué un véritable séisme sur les places boursières et le marché des changes. Alors que l’indépendance de la plus puissante banque centrale du monde semble remise en question, les investisseurs craignent désormais un bouleversement dans la politique monétaire américaine et ses conséquences sur la stabilité économique globale. La confiance des marchés, pilier essentiel du système financier, vacille face à ce bras de fer sans précédent.
Entre tweets incendiaires et menaces de limogeage : l’offensive de Trump
Les passes d’armes entre la Maison Blanche et la Fed s’intensifient jour après jour. Ce lundi 21 avril 2025, Donald Trump a franchi un nouveau cap en s’en prenant directement à Jerome Powell sur Truth Social :
« Il peut y avoir un RALENTISSEMENT de l’économie à moins que « Monsieur le retardataire », cet immense loser, ne baisse les taux d’intérêt, MAINTENANT ».
Des propos qui témoignent de l’exaspération du président face à la politique monétaire actuelle.
Ces déclarations ne sont pas isolées. Le week-end dernier, Trump avait déjà menacé de se débarrasser du patron de la Fed, affirmant depuis le Bureau ovale :
« Je ne suis pas content de lui. Je lui ai fait savoir et si je veux qu’il parte, il partira vite fait, croyez-moi ». Un message renforcé sur son réseau Truth Social par une phrase sans équivoque : « Il est plus que temps que le mandat de Powell se termine ».
Au cœur de cette confrontation se trouve un désaccord fondamental sur la gestion des taux d’intérêt :
- La position de Trump : Exige des baisses rapides et significatives pour stimuler la croissance
- La position de Powell : Préfère une approche progressive et mesurée
- Le contexte : Le mandat de Powell ne doit s’achever qu’en mai 2026
- Le précédent : Jamais un président n’a tenté de limoger le chef de la Fed pour désaccord sur la politique monétaire
Le président de la Réserve fédérale maintient sa position et reste déterminé à définir sa propre politique, indépendamment des pressions politiques. Il a récemment justifié sa prudence en pointant l’affaiblissement de la conjoncture en lien avec les tensions commerciales actuelles. Cette résistance face aux exigences présidentielles est perçue par certains comme une défense nécessaire de l’indépendance de l’institution, et par d’autres comme un entêtement préjudiciable à la santé économique du pays.
Les observateurs notent que cette situation n’est pas sans rappeler les tensions entre Trump et Powell lors du premier mandat présidentiel, mais avec une intensité nettement accrue. La différence majeure réside dans le fait que Trump, désormais au début de son second mandat, semble plus déterminé que jamais à imposer sa vision économique, quitte à bousculer les équilibres institutionnels établis.
Turbulences financières : comment les marchés sanctionnent l’instabilité
Les répercussions de ce conflit ouvert ne se sont pas fait attendre sur les marchés financiers. Dès l’ouverture des places asiatiques ce lundi, le dollar américain s’est trouvé sous forte pression, avec des baisses significatives face aux principales devises.
Devise | Baisse du dollar | Niveau atteint | Dernière fois à ce niveau |
Yen japonais | -1,00% | 140,78 ¥ pour 1$ | Mi-septembre |
Euro | -1,05% | 1,1512 $ pour 1€ | Novembre 2021 |
Michael Wan, analyste à la banque MUFG, a réagi en soulignant les signes inquiétants d’une volonté de l’administration Trump de démettre le président de la Fed. Il explique :
« Bien qu’il nous semble peu probable que l’administration Trump parvienne à révoquer purement et simplement le président de la Fed, faute de pouvoir légal, toute initiative en ce sens agitera les marchés »
Cette prédiction s’est confirmée dès l’ouverture de Wall Street le 21 avril. Les principaux indices américains ont plongé dans le rouge :
- Dow Jones : -1,86%
- Nasdaq : -2,57%
- S&P 500 : -2,08%
Sur le marché obligataire, le rendement des emprunts d’État américains à dix ans s’est tendu à 4,36%, contre 4,32% le vendredi précédent, reflétant la nervosité des investisseurs face à l’incertitude.
Cette réaction des marchés n’est pas seulement technique ou passagère. Elle traduit une inquiétude profonde des investisseurs quant à la stabilité du système financier américain. La confiance dans les institutions est l’un des piliers de l’économie de marché, et la remise en cause de l’indépendance de la Fed touche directement à ce fondement.
Les traders observent également avec appréhension les effets à plus long terme de cette crise. Au-delà des variations quotidiennes des indices, c’est la prévisibilité de la politique monétaire américaine qui est en jeu. Or, dans un contexte mondial déjà fragilisé par diverses tensions géopolitiques et commerciales, cette incertitude supplémentaire pourrait amplifier la volatilité des marchés dans les semaines à venir.
Une remise en cause de l’indépendance de la Fed
Cette confrontation entre Trump et Powell soulève des questions fondamentales sur l’autonomie de la Réserve fédérale américaine. Créée en 1913, la Fed a progressivement acquis une indépendance considérable vis-à-vis du pouvoir politique, considérée comme nécessaire à la stabilité économique du pays. Cette autonomie, garantie par le fait que le président de la Fed ne peut être limogé pour des désaccords sur la politique monétaire, semble aujourd’hui contestée.
La question de l’indépendance des banques centrales dépasse largement le cadre américain. Dans la plupart des économies avancées, cette indépendance est devenue un principe fondamental de gouvernance économique, destiné à protéger la politique monétaire des pressions politiques à court terme. Cette séparation des pouvoirs permet notamment de lutter efficacement contre l’inflation, même lorsque les mesures nécessaires sont impopulaires.
Les experts juridiques rappellent que le cadre légal actuel ne permet pas au président américain de révoquer le président de la Fed pour simple désaccord sur la politique des taux. Seuls des motifs graves comme une faute professionnelle avérée pourraient justifier une telle décision. Toutefois, la simple évocation de cette possibilité par Trump constitue déjà une pression politique sans précédent sur l’institution.
Le cadre juridique est précis : la loi fédérale stipule que les gouverneurs de la Fed, dont son président, peuvent être révoqués par le président des États-Unis uniquement pour une « juste cause », généralement interprétée comme une inconduite grave ou une incompétence manifeste, et non pour des désaccords sur la politique monétaire. Cette protection est au cœur de l’indépendance de l’institution.
Certains analystes évoquent néanmoins la possibilité que Trump tente de contourner ces restrictions légales, soit par des nominations stratégiques au conseil des gouverneurs de la Fed, soit en exerçant une pression publique constante sur Powell pour l’inciter à démissionner. Ces scénarios, bien que spéculatifs, alimentent l’incertitude des marchés.
Le malaise est palpable dans le milieu financier, où l’instabilité au sein de la plus grande banque centrale du monde est perçue comme un facteur de risque considérable. Adam Sarhan, de 50 Park Investments, résume cette inquiétude :
« Toute forme d’instabilité avec la plus grande banque centrale du monde n’est pas un bon signe. Plus il y a d’incertitude, plus la situation est grave ».
Cette crise d’autorité intervient dans un contexte déjà tendu, marqué par les incertitudes entourant la politique commerciale américaine et les craintes d’une nouvelle escalade des tarifs douaniers. Les récentes déclarations de Trump sur d’éventuelles taxes sur les importations et la renégociation d’accords commerciaux ont déjà créé un climat d’incertitude que cette nouvelle confrontation ne fait qu’aggraver.