Résumé :
- L’UE prépare officiellement un « Chips Act 2.0 » suite aux résultats mitigés du premier plan de 43 milliards d’euros
- Henna Virkkunen, responsable numérique de la Commission européenne, confirme un « fort soutien » pour cette nouvelle initiative
- Un groupe de neuf pays élabore des recommandations qui seront présentées avant l’été 2025
- Ce plan vise à renforcer les chaînes d’approvisionnement et combler les lacunes en fabrication
- En parallèle, l’UE déploie un programme de 1,3 milliard d’euros pour les technologies numériques et l’IA
Face à la compétition technologique internationale, l‘Europe intensifie ses efforts pour maintenir sa place. Après un premier « Chips Act » aux résultats mitigés, l’Union européenne prépare désormais une seconde offensive pour développer son industrie des semi-conducteurs. Ces composants électroniques, indispensables à tous nos appareils numériques, font aujourd’hui l’objet d’une rivalité intense entre les grandes puissances mondiales.
Les récentes tensions internationales ont dévoilé la fragilité européenne dans ce domaine, incitant ainsi les dirigeants du Vieux Continent à adopter une approche plus déterminée. L’heure n’est plus aux demi-mesures, mais à une action décisive pour reprendre le contrôle de cette technologie fondamentale pour l’avenir.
Premier round perdu : l’analyse d’un Chips Act aux résultats insuffisants
Le premier Chips Act européen, lancé en 2023 avec une enveloppe de 43 milliards d’euros, avait nourri de grands espoirs. Élaboré pour répondre aux initiatives similaires aux États-Unis et en Chine, ce plan ambitionnait de doubler la part de marché européenne dans le secteur des puces électroniques d’ici à 2030. Pourtant, les résultats n’ont pas répondu aux attentes initiales.
Henna Virkkunen, responsable numérique de la Commission européenne, admet que les objectifs fixés n’ont pas été atteints, soulignant ainsi la nécessité d’intensifier les efforts. Cette reconnaissance illustre une prise de conscience au sein des institutions européennes.
Néanmoins, ce premier plan a apporté des bénéfices, notamment en freinant la dégradation de l’industrie européenne face à ses concurrents. Cependant, alors que les États-Unis déploient des programmes d’aide conséquents et que la Chine investit massivement, l’Europe a rapidement compris qu’une nouvelle approche s’imposait.
Cette première expérience a également mis en lumière plusieurs défis structurels : fragmentation des efforts nationaux, insuffisance des capacités de production avancées, et dépendance excessive envers des fournisseurs étrangers. Ces enseignements précieux serviront de base pour la prochaine initiative.
Seconde chance : les détails du futur Chips Act 2.0
C’est dans ce contexte que l’idée d’un « Chips Act 2.0 » s’est rapidement développée. L’annonce officielle de cette réflexion intervient après une mobilisation importante des acteurs du secteur. Plusieurs groupes industriels et 54 parlementaires européens ont adressé une lettre ouverte appelant à cette seconde initiative.
Henna Virkkunen confime, donnant ainsi de la crédibilité à cette démarche qui semble rassembler les décideurs européen :
« Je me suis également rendu compte qu’il existe déjà un fort soutien en faveur d’un Chips Act 2 »
Pour élaborer ce nouveau plan, un groupe de neuf pays travaille actuellement sur des recommandations concrètes. Leurs conclusions, qui seront soumises à la Commission européenne avant l’été, devraient établir les fondements d’une stratégie plus efficace et mieux ciblée.
Le futur programme ne se contentera pas de reproduire les approches antérieures. Il s’articulera vraisemblablement autour de trois axes principaux : renforcer les chaînes d’approvisionnement pour sécuriser l’accès aux composants essentiels, combler les lacunes en matière de fabrication de puces et d’emballage où l’Europe accuse un retard, et capitaliser sur les atouts existants comme la fabrication d’équipements pour les puces, un domaine où certaines entreprises européennes excellent déjà.
Les puces au cœur de la sécurité nationale européenne
Derrière cette mobilisation se trouve un enjeu central : l’autonomie technologique européenne. Les semi-conducteurs représentent un élément essentiel de toute l’infrastructure numérique contemporaine, des smartphones aux systèmes de défense, en passant par les véhicules autonomes et les applications d’intelligence artificielle.
Les parlementaires européens ont souligné dans leur appel que les développements géopolitiques récents montrent que l’Europe ne peut tenir pour acquis son accès continu aux technologies avancées. Cette inquiétude repose sur des faits tangibles. Les tensions commerciales, les difficultés d’approvisionnement révélées durant la pandémie, et l’intensification des rivalités technologiques entre puissances ont exposé la vulnérabilité d’une Europe trop dépendante de l’extérieur.
L’objectif se dessine clairement : réduire la dépendance envers d’autres nations pour l’accès à ces composants fondamentaux. Cette indépendance dépasse le cadre économique et touche également à la sécurité nationale et à la capacité de l’Europe à préserver ses valeurs dans l’environnement numérique actuel et futur.
La maîtrise des semi-conducteurs s’inscrit donc dans une compétition plus vaste où se détermine l’autonomie du continent. Pour peser dans les équilibres mondiaux contemporains, l’Europe doit impérativement renforcer sa position dans ce domaine.
IA et semi-conducteurs : les deux faces de la stratégie numérique européenne
Le futur Chips Act 2.0 s’insère dans une démarche plus large de transformation numérique du continent. Parallèlement, la Commission européenne a adopté son programme de travail pour 2025-2027, issu du plan « Europe numérique ».
Doté de 1,3 milliard d’euros, ce programme complémentaire se concentrera sur plusieurs dimensions importantes : le soutien aux centres européens d’innovation numérique, le développement de l’initiative Destination Terre (visant à créer un jumeau numérique de la planète), la poursuite du portefeuille numérique de l’UE et le renforcement des capacités en matière de cyberrésilience.
Par ailleurs, l’Union européenne intensifie ses efforts dans le domaine de l’intelligence artificielle. Le 9 avril prochain, les commissionnaires examineront un plan d’action pour développer cette technologie localement. Ce plan abordera des questions essentielles comme l’infrastructure, l’accès aux données et le développement des compétences.
Toutes ces initiatives convergent vers une ambition commune, celle exprimée lors du Sommet pour l’action sur l’IA : transformer l’Europe en un continent prospérant grâce au développement, à l’intégration et à l’adoption de l’IA. Cette vision nécessite indéniablement une industrie de semi-conducteurs solide, capable de soutenir cette transformation numérique profonde.