Comment le NFP veut forcer les expatriés à payer des impôts, même à l’autre bout du monde !

Le Nouveau Front populaire dévoile son plan fiscal qui pourrait bouleverser la vie de millions de Français à l'étranger. Cette proposition, inspirée du modèle américain, promet de secouer les fondements mêmes de la fiscalité internationale. Mais derrière les promesses, se cache un défi titanesque aux implications insoupçonnées.

Les expatriés à l'oeil
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Résumé 

  • Le Nouveau Front populaire veut imposer les expatriés français comme le font les États-Unis
  • Cette mesure toucherait potentiellement 2,5 millions de Français résidant à l’étranger
  • La mise en œuvre nécessiterait de renégocier 129 conventions fiscales bilatérales
  • Les experts sont divisés sur la faisabilité et l’impact réel de cette proposition

Dans un contexte de recherche constante de nouvelles ressources fiscales, le Nouveau Front populaire vient d’annoncer l’une des mesures qu’ils souhaitaient mettre en place s’ils obtenaient le fauteuil de premier ministre. Lucie Castets, candidate à Matignon, propose ni plus ni moins que de faire payer des impôts en France aux expatriés fiscaux, s’inspirant directement du modèle américain. 

Cette idée, qui avait déjà été évoquée par le passé sans jamais voir le jour, pourrait cette fois-ci prendre forme et bouleverser la vie de millions de Français établis à l’étranger. Mais au-delà des promesses électorales, cette proposition soulève de nombreuses questions sur sa faisabilité et ses conséquences potentielles.

La proposition du Nouveau Front populaire et son fonctionnement

Le projet fiscal du Nouveau Front populaire, porté par Lucie Castets, candidate à Matignon, vise l’imposition des Français expatriés. 

Il faut aussi que les expatriés fiscaux paient leurs impôts au fisc français, comme le font les Américains expatriés vis-à-vis du fisc des États-Unis

Lucie Castets dans une interview à « La Tribune Dimanche« . 

Cette idée n’est pas nouvelle dans le paysage politique français. Jean-Luc Mélenchon l’avait déjà évoquée en 2022, et même Nicolas Sarkozy en 2012 lors de sa campagne pour un second mandat.

Lucie Castets, proposition du NFP au poste de Premier Ministre

Le principe de cet « impôt universel » serait de faire payer aux expatriés français la différence entre les impôts qu’ils paient dans leur pays de résidence et ceux qu’ils auraient payés s’ils habitaient dans l’Hexagone. Selon le député LFI Hadrien Clouet, cette mesure ne s’appliquerait qu’à partir d’un certain niveau de revenus, avec un seuil potentiel de 200 000 euros annuels évoqué comme piste de travail.

Ce projet marquerait un changement radical par rapport au système fiscal actuel en France. Actuellement, selon l’article 4B du Code général des impôts, on est imposé selon son lieu de résidence fiscale et non selon sa nationalité. La proposition du Nouveau Front populaire vise donc à aligner la France sur le modèle américain, quasi unique au monde.

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Le casse-tête juridique et diplomatique

La proposition du Nouveau Front populaire se heurte à une montagne d’obstacles juridiques et pratiques. Le chantier fiscal qu’elle implique est colossal et soulève de nombreuses questions quant à sa faisabilité.

Le défi le plus titanesque réside dans la nécessité de renégocier l’intégralité des conventions fiscales bilatérales de la France. Avec pas moins de 129 conventions répertoriées par la Direction générale des finances publiques, c’est un véritable casse-tête diplomatique qui se profile. Ces accords, qui priment sur le droit national, ne prennent actuellement pas en compte la nationalité comme critère d’imposition.

De plus, la mise en place d’un tel système nécessiterait la création d’une infrastructure administrative colossale. Comment traquer efficacement les revenus des expatriés ? Comment gérer les potentiels conflits avec les administrations fiscales étrangères ? Ces questions restent sans réponse claire pour le moment.

Le risque de double imposition est également un point crucial. Même si le projet prévoit de ne taxer que la différence entre les impôts payés à l’étranger et ceux qui auraient été dus en France, la complexité des systèmes fiscaux internationaux pourrait créer des situations compliquées pour certains contribuables.

Le modèle américain : inspiration et limites pour la France

Les États-Unis sont quasiment le seul pays au monde à disposer d’un « impôt sur la nationalité« . Tous les citoyens américains, où qu’ils résident dans le monde, sont tenus de faire une déclaration annuelle de leurs revenus à l’IRS (le fisc américain). Après une exonération d’environ 125 000 dollars, leur impôt est calculé selon le barème américain, amputé de celui payé dans l’État de résidence.

Cependant, la capacité des États-Unis à mettre en œuvre ce système repose sur un levier unique : le dollar. C’est sous la menace d’interdire toute transaction en dollars que l’administration américaine s’assure que les banques, places de marché et autres fonds de pension du monde entier fournissent à l’IRS le détail des comptes détenus par des citoyens américains. La France, malgré son influence internationale, ne dispose pas d’un tel levier économique

Il faut avoir la puissance américaine pour mettre en place un tel accord international, que personne n’a envie de ratifier.

Christopher Weissberg, ex-député Renaissance des Français de l’étranger

Sans un outil de pression équivalent, il semble illusoire pour la France de pouvoir recenser et contrôler efficacement les flux financiers générés par ses expatriés.

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Entre équité fiscale et fuite des talents

La proposition du Nouveau Front populaire suscite un vif débat entre ses partisans et ses détracteurs. Les arguments en faveur de cette mesure incluent l’équité fiscale et la génération de revenus supplémentaires pour l’État français. Ses défenseurs estiment qu’il est juste que tous les citoyens français contribuent au financement des services publics, même s’ils n’en bénéficient pas directement.

Cependant, les critiques sont nombreuses. Eric Ginter, fiscaliste au sein du cabinet Altitude avocats, rappelle que « il est faux de dire que les expatriés ne paient pas d’impôts en France ». En effet, ils sont déjà redevables de l’IFI s’ils détiennent un patrimoine immobilier en France, paient des droits de succession sur les biens situés en France, et sont imposés sur leurs revenus immobiliers français.

De plus, cette mesure pourrait avoir des conséquences négatives sur l’attractivité internationale de la France. Elle pourrait encourager la fuite des talents et dissuader les entreprises internationales d’embaucher des Français pour des postes à l’étranger, craignant des complications fiscales.

Roland Lescure, ministre démissionnaire de l’Industrie et nouveau vice-président (Ensemble pour la République) de l’Assemblée nationale, résume ainsi les critiques : « Cette mesure est à la fois complexe administrativement, peu rentable financièrement et injuste politiquement.« 

Enfin, se pose la question de la réciprocité des droits. Si les expatriés étaient soumis aux mêmes barèmes que les résidents, faudrait-il leur donner accès aux mêmes droits : RSA, prestations familiales, éducation gratuite, frais de santé remboursés ? Cette question soulève des enjeux complexes de citoyenneté et de droits sociaux à l’échelle internationale.

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