Résumé :
- Donald Trump a annoncé le retrait des États-Unis de l’accord OCDE sur la taxation minimale des multinationales à 15%, signé en 2021 par 140 pays, dès son premier jour de mandat en 2025
- Cette réforme fiscale mondiale devait générer 200 milliards de dollars de recettes fiscales annuelles et permettre de mieux taxer les géants du numérique
- Le taux d’imposition effectif des entreprises américaines est passé de 16% en 2014 à environ 9% depuis 2018, bien loin du taux officiel de 21%
- La Maison Blanche prévoit des « mesures de protection » contre les pays qui imposeraient une fiscalité jugée préjudiciable aux entreprises américaines
- L’Union européenne « regrette » cette décision mais souhaite maintenir le dialogue, tandis que des ONG craignent la destruction du système fiscal international
Un accord historique remis en cause
L’accord, négocié sous l’égide de l’OCDE, représentait une avancée significative dans la lutte contre l’optimisation fiscale agressive des grandes entreprises. Son principe fondamental reposait sur l’instauration d’un taux minimal d’imposition de 15% sur les bénéfices des multinationales, associé à un mécanisme innovant permettant de taxer les géants du numérique là où ils exercent réellement leur activité, plutôt que dans les paradis fiscaux.
Les enjeux financiers étaient considérables : l’OCDE estimait que cette réforme fiscale devait générer plus de 200 milliards de dollars de recettes fiscales supplémentaires chaque année à l’échelle mondiale. Une manne qui risque désormais de s’évaporer avec le retrait américain.
La souveraineté nationale comme justification
Donald Trump justifie sa décision par deux arguments principaux : la préservation de la « souveraineté nationale » en matière fiscale et le maintien de la « compétitivité économique » américaine. Cette position s’inscrit dans la continuité de sa première présidence, marquée par une réduction drastique de l’impôt sur les sociétés, passé de 35% à 21% en 2017.
La réalité du terrain est encore plus frappante : selon le Bureau de la responsabilité du gouvernement (GAO), le taux effectif d’imposition des entreprises américaines a chuté à environ 9% depuis 2018, alors qu’il atteignait 16% en 2014. Une situation que la nouvelle administration Trump semble vouloir non seulement maintenir, mais également renforcer.
Des réactions internationales inquiètes
L’Union européenne, par la voix du commissaire européen à l’économie Valdis Dombrovskis, a exprimé ses regrets face à cette décision unilatérale. Bruxelles souhaite maintenir le dialogue avec Washington pour « mieux comprendre leurs interrogations et expliquer notre position ».
Plus alarmiste, Alex Cobham, directeur de l’ONG Tax Justice Network, considère que Trump « vient non seulement de tuer la faible réforme fiscale de l’OCDE, mais menace aussi de détruire tout ce qui a été construit depuis un siècle » en matière de fiscalité des entreprises.
Vers une nouvelle guerre fiscale ?
La Maison Blanche ne s’arrête pas au simple retrait de l’accord. Le document présidentiel demande au département du Trésor de préparer des « mesures de protection » contre les pays qui imposeraient une fiscalité jugée « extraterritoriale » ou affectant « de manière disproportionnée les entreprises américaines ». Cette menace à peine voilée laisse présager de possibles tensions commerciales et fiscales avec les partenaires économiques des États-Unis.
Cette décision soulève des questions cruciales pour l’avenir de la coopération fiscale internationale. Comment maintenir un système fiscal mondial cohérent sans la participation de la première puissance économique mondiale ? Les autres pays signataires maintiendront-ils leur engagement envers l’accord, ou assisterons-nous à un effet domino ? L’enjeu est désormais de préserver les avancées obtenues tout en évitant une dangereuse course au moins-disant fiscal.