Résumé :
- Les 10% les plus riches détiennent 54% du patrimoine total et reçoivent près d’un quart des revenus.
- En France, les inégalités de patrimoine sont légèrement moins prononcées que dans le reste de la zone euro.
- Le patrimoine net moyen s’élève à 446 000 euros par ménage, mais la moitié des ménages possède moins de 185 000 euros.
En effet, la question des inégalités est revenue sur le devant de la scène ces derniers mois, portée notamment par des voix de l’opposition dénonçant la fortune de certains ministres ou plaidant pour une taxation accrue des plus aisés. En toile de fond, les chiffres donnent le tournis.
Selon la Banque de France, les 10% des ménages les plus fortunés vivant dans l’Hexagone possèdent à eux seuls 54% du patrimoine total du pays, un chiffre stable depuis 2019. À l’autre bout de l’échelle, les travaux de l’Insee révèlent que les 10% les plus pauvres perçoivent près de huit fois moins que les 10% les plus riches.
Ces données jettent une lumière crue sur les disparités de richesse qui fragmentent la société française. Certes, comme le souligne la Banque de France, les inégalités de patrimoine apparaissent légèrement moins prononcées dans l’Hexagone que chez nos voisins de la zone euro. Elles n’en demeurent pas moins vertigineuses. Aujourd’hui en France, les 10% les plus aisés possèdent un patrimoine au moins 163 fois supérieur à celui des 10% les plus modestes. Un gouffre abyssal qui interroge sur la réalité de la promesse républicaine d’égalité.
Un patrimoine qui s’envole, des inégalités qui se creusent
Les dernières données de la Banque de France mettent en évidence une envolée du patrimoine des ménages français ces dernières années. Entre fin 2009 et fin 2021, il a bondi de 23% en euros constants, pour atteindre la somme faramineuse de 14 041 milliards d’euros au deuxième trimestre 2023.
Une hausse portée en premier lieu par l’augmentation de la valeur de la pierre (l’immobilier). Ainsi l’immobilier représente en effet 55% du patrimoine moyen des ménages. Mais cette manne profite surtout aux plus aisés : les 60% les mieux dotés concentrent 99% du patrimoine immobilier net d’emprunts.
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— MoneyRadar (@MoneyRadar_FR) June 16, 2024
Cette dynamique contribue mécaniquement à creuser le fossé entre le haut et le bas de l’échelle. Si le patrimoine net moyen s’élève désormais à 446 000 euros par ménage en France, en hausse de 13% par rapport à 2009, la moitié de la population dispose, elle, de moins de 185 000 euros. À l’inverse, les 10% les plus riches possèdent au moins 716 000 euros d’actifs quand les 10% les plus pauvres doivent se contenter au mieux de 4 400 euros.
La hausse des prix de l’immobilier n’explique pas à elle seule le creusement des inégalités patrimoniales. Selon la Banque de France, la progression de la valeur du patrimoine professionnel, c’est à dire l’ensemble des éléments nécessaires à l’exercice de l’activité, concentré dans les mains des 20% les plus aisés, ainsi que l’augmentation générale des dépôts et de l’épargne retraite ont aussi contribué à enrichir davantage les plus fortunés.
Des revenus toujours aussi concentrés
Du côté des revenus, le constat n’est guère plus réjouissant. En 2021, d’après l’Insee, le dixième le plus riche de la population a perçu près d’un quart (24,4%) de la masse totale des revenus après impôts et prestations sociales.
À titre de comparaison, les 10% les plus modestes n’ont dû se contenter que de 3,1% du total. Si les classes moyennes, situées entre les 30% les plus pauvres et les 20% les plus riches, récupèrent environ la moitié du gâteau, les parts sont loin d’être équitables pour tous.
Cette répartition déséquilibrée s’explique avant tout par la très forte concentration des revenus du capital et du travail. Malgré un système socio-fiscal redistributif, qui réduit les écarts grâce aux impôts et aux prestations, les inégalités demeurent criantes. Le modèle français apparaît toujours incapable de répartir équitablement les richesses produites dans le pays.
Une volonté politique de s’attaquer au problème ?
Face à ce constat alarmant, des voix s’élèvent pour réclamer une action politique forte. À gauche, la cheffe de file des députés LFI, Mathilde Panot, a dénoncé en février dernier un gouvernement composé de « 17 ministres millionnaires sur 34 ». Une façon de souligner le décalage entre les élites et le reste de la population.
Au sein même de l’exécutif, certains semblent avoir pris la mesure du problème. Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a ainsi exprimé sa volonté d' »accélérer » les négociations internationales en vue d’instaurer une taxation minimale des milliardaires.
Une prise de conscience tardive alors que l’ONG Oxfam souligne que dans les pays du G20, les ultra-riches ont vu leurs taux d’imposition s’effondrer au fil des décennies. Aujourd’hui, moins de 8 cents sur chaque dollar de recettes fiscales provient de l’impôt sur la fortune.
Sources :